Pour une décentralisation effective au Sénégal : enjeux et perspectives selon Djibril DIOP

Ce mot doit être certainement le mot magique pour le nouveau gouvernement sénégalais.

Jusque-là, au moins si l’on se réfère à la réforme majeure de 1972 créant les communautés rurales au Sénégal à la communalisation intégrale et à la départementalisation de 2014, la décentralisation est restée une notion purement technique avec un contenu purement administrative et politique au Sénégal, pour ne pas dire politicienne.

Certainement, c’est parce qu’elle n’est pas une émanation d’une demande de la part de la population (dans le sens Bottom up, mais put down), car promue par une élite, qui ne trouvait pas un positionnement dans l’appareil exécutif et législatif national.

C’est ainsi qu’on note depuis ses débuts une déconnexion entre le discours politique et les textes d’un côté et de l’autre la réalité vécue par les population, même si ces dernières années on observe une prise de conscience de la réalité du pouvoir local à travers la responsabilité et l’imputabilité des élus locaux. L’essence de toute décentralisation est de promouvoir le développement local.

En effet, comme finalité tout processus de décentralisation, le développement local devrait permettre aux populations de rester dans leurs terroirs, y travailler et d’avoir un bon cadre de vie avec des services accessibles.

Malheureusement, la décentralisation sénégalaise s’est montrée déconnectée de cet objectif. Ainsi, tout le se rue vers Dakar. Or, chaque 5 ans on élit des élus locaux, qui votent un budget et on ne sait pourquoi; car le développement semble être encore un rêve lointain.

Par ailleurs, toutes les problématiques qui assiègent la capitale sénégalaise aujourd’hui et qui continueront de se complexifier si rien n’est fait dans le sens d’une vraie décentralisation (hypertrophie, macrocéphalie, mobilité urbaine difficile, coût du loyer, insécurité…), ne sont-elles pas la résultant de ce état de fait ? Donc leurs solutions ne sont-elles pas à chercher hors de Dakar?

Certes, ces dernières années plusieurs initiatives ont été engagées par les deux précédents régimes (autoroutes à péage, création de nouvelles routes, prolongation VDN, aménagement d’auto ponts, TER, BRT, …) qui ont permis l’ouverture de la ville sur toute l’étendue de la région métropolitaine. Mais tout cela ne concours t-il pas à un appel d’air pour une jeunesse en mal d’existence dans les terroirs et dont les mirages d’une ville de près de 4 millions d’habitants et qui accueille chaque année entre 80.000 et 120.000 personnes supplémentaires, attirent ?

La solution ne pourra être que radicale à mon sens, si l’on veut désengorger Dakar et permettre en même temps le développement de villes secondaires et de villes régionales.

Pour cela le gouvernement devrait s’engager dans un premier temps dans la déconcentration de toutes les directions dont leurs activités n’exigent par leur présence à Dakar comme l’agriculture, l’élevage, l’état civil, et tout ce qui est lié à l’automobile entre autres, respectivement vers Thiès, Dahra, Kaolack et Tambacounda,… La présence de hauts fonctionnaires et l’offre de services qui va avec dans ces localités donneront certainement un coup de fouet à l’économie locale (les pionniers de Sanar pourraient témoigner sur l’impact de l’ouverture de l’UGB dans le développement de Saint-Louis et environs).

Tout cela devrait permettre également un développement équilibré du territoire avec un soutien infrastructurel à travers un programme spécial d’équipement et une valorisation des potentialités locales.

La dématérialisation des procédures administratives promise par le Président Bassirou Diomaye Faye devrait être un outil de facilitation pour la mise en œuvre d’un tel programme.

Auteur : Djibril DIOP

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