L’Armée française continue de plier ses bagages au Sénégal. Après le départ du 23ème BIMA il y a quelques années, c’est la Marine Française qui va quitte notre pays au plus tard en fin juin. A cette date, la base militaire française de Ouakam sera libérée aux trois quarts par ses occupants. A terme, la présence militaire française, estimée à près de 500 hommes, sera fortement réduite à la fin de l’année 2024 et ne devrait plus être constituée que de 260 EFS (Eléments français au Sénégal) principalement des instructeurs. Face à la vague de contestation de sa présence militaire en Afrique, la France a décidé de réduire une longue présence de ses troupes dans le continent noir et surtout dans des pays qu’elle avait colonisés. Et avec lesquels elle avait signé non seulement des accords de défense mais aussi des accords de coopération culturelle, technique, financiers et économiques entre autres. « La philosophie de ce changement, c’est de coopérer autrement, pas de mettre plus ou moins d’hommes. Nous rentrons dans un cycle où nous allons travailler en deuxième rideau » confiait un conseiller du président Emmanuel Macron. Lequel avait décidé, à l’entame de son second quinquennat en février 2023, de revoir la politique de la présence militaire française en Afrique. A cette période, l’Elysée soulignait qu’Emmanuel Macron avait décidé d’exposer « ses priorités et sa méthode pour approfondir le partenariat entre la France, l’Europe et le continent africain ». Dans le sillage, Paris a expliqué comment il comptait envisager l’évolution de sa présence militaire sur le continent africain alors que l’armée française a dû quitter le Mali et le Burkina où elle était engagée dans des actions conjointes de lutte contre le terrorisme. Le Sénégal n’échappe pas à cette nouvelle politique de restructuration de la présence militaire française en Afrique. A partir de fin 2023, la présence militaire française dans notre pays sera réduite et les formations de plus en plus cogérées avec l’armée sénégalaise. D’ici au mois de juin, les éléments français au Sénégal devraient passer de 500 à 260 environ pour l’essentiel des instructeurs qui resteront pour poursuivre les formations. Cette nouvelle orientation des relations militaires entre la France et le Sénégal survient près de 14 ans après la signature, le 1er août 2011, entre la France et le Sénégal créant les éléments français au Sénégal (EFS) qui constituent à Dakar un « pôle opérationnel de coopération » (POC) à vocation régionale. Les EFS qui remplacent les Forces françaises du Cap-Vert (FFCV) disposent, selon une note du ministère français des Armées visitée par le Témoin, de la capacité d’accueillir, de soutenir voire de commander une force interarmées projetée. S’inscrivant ainsi dans une posture de prévention, les EFS demeurent un point d’appui matérialisé par l’existence d’un noyau clé de poste de commandement interarmées (PCIA) et d’escales navale et aéronautique. Les EFS sont implantés au quartier « colonel Frédéric Geille » à Ouakam et au quartier « contre-amiral Protêt » au niveau de la base navale Faye Gassama située au Port militaire de Dakar. Ils disposent également d’une escale aérienne à l’aéroport militaire Dakar-Senghor, d’une station d’émission haute fréquence de la Direction interarmées des réseaux d’infrastructures et des systèmes d’information (DIRISI) à Rufisque. Sur les 500 militaires français déployés actuellement sur le territoire national, Le Témoin a appris que près de 70 des 80 EFS de la base navale « contre-amiral Protêt », vont quitter le Sénégal entre les mois de mai et de juin. Seul un groupe de 10 EFS, tous des marins, va rester à la base de Dakar pour certainement accompagner en termes d’encadrement et formation la marine sénégalaise. Dans l’autre position stratégique au niveau du quartier « colonel Frédéric Geille » à Ouakam, près des ¾ de l’effectif vont quitter notre pays d’ici la fin de l’année. En 2010, la France restituait sa base militaire de Bel Air La nouvelle orientation politique de la présence militaire française en Afrique et particulièrement à Dakar avait commencé en 2010 sous l’ère du président Abdoulaye Wade. Ce dernier était parvenu à un accord pour fermer les bases françaises à Dakar. Me Wade avait fait de cette fermeture une question d’honneur. Il avait d’ailleurs profité de son discours à la veille de la fête de l’indépendance du 04 avril 2010 pour annoncer la fermeture de certaines bases de l’ancien colonisateur. Pour le Président Wade, le fait pour la France de conserver des bases militaires (terrestre, aérienne et navale au Sénégal) devenait de plus en plus incongrue et a été souvent ressentie (…) comme une indépendance inachevée. « Je déclare solennellement que le Sénégal reprend à partir de ce jour 04 avril à 00h00 toutes les bases militaires antérieurement détenues sur notre sol par la France et entend y exercer sa souveraineté qui repose sur la présente déclaration » disait Me Wade. C’est ainsi que la base militaire française de Bel Air, qui accueillait près de 1200 soldats du 23ème Bataillon d’infanterie de Marine (BIMA), avait été restituée au Sénégal lors d’une cérémonie symbolique tenue au sein dudit camp le 09 juin. A l’époque, l’accord prévoyait que 300 soldats français resteraient stationnés dans notre pays. Ce départ des forces françaises aura plusieurs impacts dont le premier s’est qu’il se fera ressentir par les travailleurs civils. Ces derniers, qui appuient au niveau de l’administration et des travaux divers le dispositif opérationnel, constituent actuellement un effectif de 200 travailleurs. Au terme du processus, 150 employés civils des EFS vont perdre leurs emplois. Seule une cinquantaine d’employés civils vont garder leurs emplois. L’Etat-major des EFS a cependant mis en place un dispositif social d’accompagnement pour les travailleurs qui vont partir.
A.K. DIARRA