Requête de Députés de Yewwi : 10 Ministres Visés par l’Affaire des 1000 Milliards du COVID

Trois ans après la mise en place du programme de résilience pour faire face à la pandémie de Covid 19 et doté d’un montant de 1000 milliards de francs, des députés ont déposé, lundi, une requête visant dix ministres en fonction à cette époque. Et qui avaient eu à gérer les fonds débloqués par le gouvernement à cette occasion. Parmi les ministres visés par la requête des députés, on peut citer Amadou Mansour Faye, Abdoulaye Diouf Sarr, Abdoulaye Daouda Diallo, Moustapha Diop, Abdoulaye Diop, Aïssatou Sophie Gladima, Zahra Iyane Thiam, Ndèye Saly Diop Dieng, Aminata Assome Diatta et Néné Fatoumata Tall. Et le ministre des Sports de l’époque ?

Au total, 29 députés du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi ont déposé, lundi, auprès de la Haute Cour de Justice, une requête visant dix ministres. Ces membres du gouvernement, en poste au moment de la crise du Covid 19 entre 2020 et 2022, sont accusés de détournement de fonds destinés à soutenir les populations lors de cette période difficile. En premier lieu, il y a le ministre Amadou Mansour Faye qui occupait à l’époque le poste de ministre du Développement communautaire et de l’Equité territoriale, un département qui a été au cœur de l’aide sociale apportée par l’Etat à l’endroit des compatriotes impactés par la pandémie. La Cour des comptes avait épinglé le ministère du Développement communautaire, de l’Équité sociale et territoriale pour un marché de riz de 2,5 milliards attribué dans le cadre de la riposte aux effets de la Covid-19. Mansour Faye, qui dirigeait le département à l’époque, s’était insurgé contre les conclusions dudit rapport. Son collègue et ancien ministre de la Santé et de l’Action sociale, Abdoulaye Diouf Sarr, est cité pour plusieurs faits concernant la gestion sanitaire de la pandémie avec des surfacturations notées dans l’achat de médicaments.

Selon le rapport définitif de la Cour des comptes, des entreprises privées, notamment trois agences de voyages, dont les compétences sont diamétralement opposées à la Santé publique, ont gagné 15 milliards de FCFA à travers 17 marchés de fourniture de matériel médical. Une certaine Mme Gadiaga avait touché le jackpot puisque la plupart des marchés émis par le ministère de la Santé avaient été gagnés par elle à travers diverses sociétés lui appartenant. « Il s’y ajoute qu’au MSAS, à titre d’exemple, la dérogation au CMP (Ndlr, code des marchés publics) de 2014 a entraîné une absence de mise en concurrence avec pour effet de faire bénéficier à des entreprises de parts de marché plus importantes, en concentrant des marchés sur un nombre restreint de fournisseurs. Ainsi, les entreprises MEDINE SARL, NKG, SONABI et AL NABIYOU VOYAGES, appartenant à la même personne nommée Madame Ndèye Katy Gadiaga, ont fourni, en 2020, des matériels médicaux et des équipements de protection individuelle au MSAS pour un montant total de 15 578 132 877 FCFA correspondant à 17 marchés», lit-on dans le document. C’est donc une voyagiste qui avait raflé presque tous les marchés de matériels médicaux et sanitaires destinés au ministère de la Santé !

Quant à Abdoulaye Daouda Diallo, il était ministre en charge des Finances et du Budget d’où a été mobilisée la somme de 1000 milliards de francs CFA. Pour Abdoulaye Daouda Diallo, ministre des Finances et du Budget au moment des faits, les députés estiment qu’il mérite d’être traduit devant la Haute Cour de Justice pour négligence, défaut d’encadrement des procédures appliquées en cas de situation exceptionnelle de manière à encourager les détournements des deniers publics, mais aussi complicité de non production des pièces justificatives de plusieurs dépenses, paiement de plusieurs dépenses fictives, paiement de dépenses sans lien avec la Covid-19, pour non-assistance à personnes en danger, abus de confiance, complicité de détournement de deniers publics. D’autres ministres sont aussi concernés par cette saisine de la Haute cour de justice. Il s’agit entre autres de Moustapha Diop cité dans une affaire de marchés liés au soutien social dans le cadre d’un programme de résilience face au Covid 19. Moustapha Diop, qui occupait les fonctions de ministre du Développement industriel et des Petites et moyennes industries au moment des faits, doit être poursuivi, selon les députés signataires de la requête, pour complicité dans les procédures financières appliquées en cas de situation exceptionnelle de manière à encourager les détournements des deniers publics, détournement de deniers publics (sur les retraits répétitifs sur le compte du Fonds d’appui à la promotion de la petite et moyenne industrie (FAPPMI) pour un montant cumulé de 2. 500 000 000 Fcfa, Cf. recommandations de la Cour n° 60 et 61, pp.109-110). Quant à Aissatou Sophie Gladima, les députés soutiennent qu’elle doit être poursuivie pour paiement non justifié et absence de service fait pour un montant de 73 200 000 FCFA, et ce, sur la base de la recommandation N°67 de la Cour, (p.119). Concernant Zahra Iyane Thiam, ministre de la Microfinance et de l’Economie sociale et solidaire au moment des faits, la Cour des comptes a relevé l’exécution de dépenses sans lien avec la Covid19 évaluées à 49 586 598 Fcfa, l’utilisation non justifiée d’un montant de 11 191532 Fcfa, de la recommandation n°52 de la Cour (p.94.). De la petite monnaie par rapport à ce qui est reproché à Abdoulaye Diouf Sarr, surtout, mais aussi à Amadou Mansour Faye et Moustapha Diop.

Des ministres qui risquent gros

Ndèye Saly Diop Dieng, ministre de la Femme, de la Famille, du Genre et de la Protection des Enfants au moment des faits, est épinglée pour défaut de justification de dépenses, paiements d’aides et secours aux mêmes personnes par le MFFGPE d’un montant de 93 209 500 Fcfa, et ce, sur le fondement des recommandations n° 62, 63, 64 et 65 de la Cour (pp.112-117). Ministre de la Jeunesse au moment des faits, Néné Fatoumata Tall doit être poursuivie pour complicité de surfacturation sur le prix du gel hydro-alcoolique d’un montant de 41 217 580 FCFA, (Cf. recommandation de la Cour N°56 de la Cour, p.102). Aminata Assome Diatta, qui occupait les fonctions de ministre du Commerce et des Petites et Moyennes entreprises à l’époque, doit être poursuivie pour complicité de surfacturation sur le prix du gel hydro-alcoolique d’un montant de 805 000 000 FCFA,(Cf. recommandation N°56 de la Cour, p.102), mais aussi pour abus de confiance, complicité de détournement de deniers publics par des dépenses fictives et des dépenses sans lien avec la Covid19, association de malfaiteurs en vue de piller les deniers publics, complicité dans la prévarication des ressources publiques, complicité pour malversations financières, complicité de blanchiment de capitaux, faux et usage de faux sur des documents administratifs, faux en écritures publiques, complicité d’escroquerie sur les derniers publics et toutes autres qualifications dont ces faits pourraient être interprétés par la Commission d’instruction de la Haute Cour de Justice. Abdoulaye Diop, ministre de la Culture et de la Communication au moment des faits, doit être poursuivi pour absence de certaines pièces justificatives sur un montant de 1 120 000 000.

Il reste que cette démarche de Yewwi pourrait difficilement prospérer du fait que cette coalition est encore minoritaire à l’Assemblée nationale où Benno Bokk Yakaar reste majoritaire. Pour que la mise en accusation puisse réussir, il faut avoir les 3/5 des députés. Toutefois, la plainte des initiateurs de la requête a le mérite de constituer une piqûre de rappel à l’attention de la justice — qui dort depuis qu’elle a été saisie d’une plainte sur ces faits gravissimes — et aussi à celle des nouvelles autorités du pays afin qu’elles tiennent leur promesse d’obliger les responsables du régime sortant à rendre des comptes sur leur gestion des fonds publics.

Auteur : Moustapha DIAGNE / Le témoin

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